Il faut passer outre le léger agacement. Vu de Bretagne Paris c’est souvent (encore, pas toujours) l’endroit où l’on ne voudrait pour rien au monde habiter, où l’on respire mal (mais respirais-je mieux dans la petite ville du Grand Ouest où se sont tranquillement écoulées mon enfance et mon adolescence?); Paris où l’on vous marche dessus (ah! marcher sur des gens) ; et puis on est si bien, en Bretagne, la nature. La nature en Bretagne, vaste sujet en effet.
On part donc sur les routes pour quelques book days (cette belle expression de Bergounioux, de ses essentiels Carnets de notes). En premiers lieux deux librairies-cafés, ou cafés-librairies, le genre est à la mode, il y a même un réseau entier, une fédération des cafés-librairies bretonnes.
Première étape à Huelgoat, au sud de Morlaix. Au milieu (enfin au sortir) d’une forêt peuplée de gros rochers ronds, on trouve l’Autre rive.
Une maison, des fauteuils de cuir, une terrasse plus qu’agréable en cet été indien. La charcuterie est bonne, le tenancier sympathique, si l’on tient compte de mon avertissement liminaire.
Livres en petit nombre bien sûr, mais c’est là aussi l’intérêt de ce genre d’échoppe : mettre sous les yeux ce qui disparaît habituellement dans la masse des nouveautés. Le librairie sait qu’il n’a aucun intérêt, dans tous les sens du terme, à rivaliser avec les grosses écuries urbaines en proposant les ouvrages dont on parle partout.
La sélection se fait intempestive.
Plus au nord, dans la baie de Morlaix, le plus ancien (à ma connaissance) des cafés-librairies de la région, qu’on fréquente régulièrement depuis dix ans. Caplan and Co, à Poul Roudou pour être précis.
Sélection littérature assez impeccable, beaucoup de philosophie, quasiment tout Gracq chez Corti (ce que, pour le coup, on ne trouve pas toujours ailleurs).
Petite promenade au bord de la mer, la lumière ingrate me convient bien. Puis On the road again, direction les librairies d’occasion plus à l’est.